Thonon Agglomération

Blind-test sur le Léman : Une expérience unique de navigation pour les malvoyants

Actualité
01/09/2020 Vie de l'agglomération

Du 24 au 28 août dernier, la base nautique de Sciez accueillait pour la première fois un stage de compétition pour des personnes malvoyantes. Ces stages d’une semaine regroupent des pratiquants d’handivoile venus des quatre coins de l’hexagone et de la Suisse. L’objectif : les préparer aux futurs compétitions nationales et internationales de « blind sailing », dont le point d’orgue sera les championnats du monde 2021.

Embarquez à bord d’un équipage pas comme les autres !

Sur terre, ils se déplacent prudemment à l’aide de leur canne ou de la main bienveillante d’un partenaire. Sur l’eau, ils semblent soudain pris d’une liberté qui les entraine vers le grand large. Ils sont 4 navigateurs ce matin-là à embarquer à bord d’un voilier adapté à leur handicap, une déficience visuelle totale ou partielle. Gilles Brunet et Olivier Ducruix sont venus de Lyon, Nicolas Rondouin de Nantes, et Justine Cebrian de Cervens pour naviguer sur les eaux du Léman et perfectionner leur apprentissage de la voile. Gilles Guyon, directeur de la base nautique de Sciez les accompagne sur les flots depuis son zodiac et coordonne à distance les opérations de navigation.

« La communication à bord, c’est comme nos yeux, ça nous permet de nous repérer. »

« On part au près ! On règle les voiles ! Va chercher grelot, le foc… ! »

Le langage est technique et les gestes sont sûr. Le voilier, sous l’effet du vent et des nombreuses actions, prend de plus en plus de vitesse. À bord, chacun à son poste, est à l’écoute de ses partenaires. Olivier Ducruix, porteur du projet « Cécivoile » (voile et cécité) et membre de l’Union Nationale des Aveugles et Déficients Visuels (UNADEV) de Lyon, nous confie l’importance de la communication pour un équipage de ce type.

« On se parle tout le temps dans le bateau. Un langage très bref, parfois simplement un mot pour exprimer une action. Puis chacun dit constamment ce qu’il est en train de faire de manière à transmettre l’information à l’ensemble de l’équipage. La communication à bord, c’est comme nos yeux, ça nous permet de nous repérer. »

Et à voir la facilité avec laquelle le voilier se déplace sur les eaux du Léman, on en oublierait presque qu’à bord, personne ne peut jouir de la vue de ce magnifique spectacle et de la splendeur des paysages. Mais la perception ne passe pas uniquement par les yeux !

Sensation de vitesse et de sûreté

Gilles Guyon, qui suit de près le voilier afin d’en assurer sa sécurité, donne les consignes du prochain exercice : naviguer au son des bouées sonores qu’il vient d’installer sur l’eau. L’équipage s’exécute et parvient sans difficultés à atteindre son but. L’exercice doit leur permettre d’appréhender les conditions d’une course professionnelle, à laquelle chacun espère briller lors des prochains championnats du monde de « blind sailing » de 2021. Mais pour l’heure, il s’agit avant tout de goûter aux plaisirs de la navigation et de vivre une expérience collective épanouissante. Justine, ancienne navigatrice voyante, qui a perdu la vue des suites d’une maladie il y a 5 ans, retrouve pour la première fois les plaisirs de la navigation. L’émotion est bien présente et les gestes toujours aussi efficaces.

« Je n’ai rien oublié de la navigation, je dois simplement adapter ma manière de faire à mon handicap. Je ressens de nouveau la sensation de vitesse sur l’eau, tout en étant en sureté. Alors que sur le sol, en tant que déficient visuel, c’est la lenteur qui nous caractérise. »

La base nautique de Sciez ou la navigation pour tous

De retour sur le plancher des vaches et à voir les sourires sur les visages de l’ensemble des navigateurs, on ne peut que saluer le travail des membres de la base nautique de Sciez, qui depuis plusieurs années ont fait de la pratique handivoile leur marque de fabrique. Aujourd’hui, avec l’ouverture d’un pôle sportif national pour malvoyants qui se caractérisera par une convention avec l’Union Nationale des Aveugles et Déficients Visuels (UNADEV) et la Fédération Française de Voile (FFVoile) en septembre 2020, la base nautique de Sciez poursuit son objectif de rendre la navigation accessible pour tous. Les travaux actuellement en cours vont d’ailleurs notamment permettre la mise en place d’un ponton d’une longueur de 43 mètres pour assurer l’embarquement à bord des bateaux par des personnes handicapées, moteur ou mental. Des aménagements et un développement des activités qui donnent le droit de rêver à l’organisation des championnats du monde 2024 de « Blind Sailing », sur la base nautique de Sciez. Objectif à suivre… !